Permission accordée

Ce soir là, Peragus avait donné permission à tout le monde, sauf à Duvallon, qui était en charge de protéger leur nouveau camp de base. Il avait pensé aller retrouver Véronique pour sortir un peu et discuter du passé, mais il se résigna. Il n'avait pas le courage d'aller la voir, pas dans la situation actuelle. Il pensa alors demander à Thomas, ou à Frédérique ou même à Gérald Tremblay, mais chacun d'entre eux, il avait une raison de vouloir en rester loin dans l'immédiat. Il les appréciait tous, mais probablement pas à leur juste valeur et il le regrettait amèrement. Il pensa aussi à Léo, mais...

*Advienne que pourra* pensa Valkyrion en s'éloignant du campement seul, n’amenant avec lui que son épée aux reflets irisés et une flasque de whisky caché dans sa poche arrière gauche.

Il avait toujours eu un grand sens du devoir, mais bien peu de courage, autant en combat que dans ses relations avec les gens. Il n'avait pas le courage de faire les premiers pas, d'aller voir les gens et d'apprendre à les connaître. Et il n'était pas le genre d'homme facile d'approche non plus...

Cela lui convenait, plus souvent qu'autrement, mais comme tout le monde, il lui arrivait parfois de se sentir seul. En ce soir, il aurait donné n'importe quoi pour que quelqu'un, n'importe qui, vienne lui tenir compagnie. Lui dire qu'il n'était pas seul, peut-être même lui dire qu'il faisait du bon travail malgré toutes les péripéties qu'il subissaient.

Mais il n'espérait pas trop.

Il prit sa première gorgée de whisky.

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Une paire d'yeux observait l'homme qui s'éloignait seul. Le regard rivé sur l'épée qu'il tenait, elle s'approcha avec caution.

Après quelques minutes d'observation, la jeune femme sortit de sa cachette, s'approchant à pas de loup, pour déboucher à la droite du soldat.

-Il est tard pour s'éloigner ainsi seul.

Clélia n'avait pas sortit d'arme, mais Griffe luisait doucement à sa ceinture, à portée de la patte si l'Harmokien sortait sa lame.

Il entendit des pas, mais ne réagit pas outre mesure. Il prit le temps de finir de savourer sa gorgée d'alcool, sa main libre se faufilant discrètement jusqu'au manche de son arme.

Peragus tourna la tête et vit Cléia. Sa main ne bougea pas de la poignée de son épée, mais il lui répondit d'un ton calme, dépourvu de méchanceté.

-Je pourrais te dire la même chose, petite fille.

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La prêtresse haussa un sourcil à l'appellation du soldat, jugeant qu'il était bien mal placé pour la traiter ainsi de petite fille. Il lui semblait plus jeune qu'elle, mais elle n'aurait su le confirmer avec exactitude.

Elle s'approcha de lui silencieusement, par habitude plus que par besoin, et s'accroupie à quelques pas de l'Harmokien.

- La forêt me connait. Pas toi. Je ne craint rien dans les bois. Du moins, la plupart du temps...

Elle pensa à la rencontre qu'elle y avait fait quelques lunes plus tôt, puis chassa ce souvenir de ses pensées.

Désormais intriguée par la présence du jeune homme sur son territoire de ronde, elle décida de lui tenir compagnie un moment. Jusqu'à ce qu'un des deux tape sur les nerfs de l'autre.

Elle le dévisagea quelques minutes avant d'avancer ses premières questions.

-Pourquoi tu ne gardes pas les tiens ce soir? Je surveille ici chaque fois que la lune brille dans le ciel. Pourquoi ce soir plutôt qu'un autre soir?

-Tu connais la forêt. Soit. Je me connais moi-même. Je ne crains pas d'aller où je veux, quand je veux.

La vérité sur les raisons qui le poussaient à ne pas craindre ce genre de situations étaient hautement plus subtiles, mais il ne désirait pas s'y attarder. Par ce soir, et définitivement pas avec elle.

-Les miens sont capables de se garder eux-mêmes. Ils n'ont pas besoin que je sois toujours auprès d'eux. Je suis leur chef : pas leur mère.

Il répondit ensuite à son autre question. Pourquoi ce soir plutôt qu'un autre?

-Le loup a-t-il besoin d'une raison pour s'isoler et hurler à la lune? Je n'ai pas besoin de raisons pour me retirer et contempler son éclat. Ceci étant dit, si c'est ton coin et que je te dérange, j'irai plus loin.

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Clélia pencha la tête sur le côté, incertaine de comprendre la distinction entre chef et parent que le soldat lui expliquait. Un froncement de sourcil plus tard, elle décida qu'elle s'en balançait. Elle renversa ensuite sa tête vers l'arrière, dans un rire sec, presqu'un aboiement.

- Oui.

Elle se remit à fixer son interlocuteur.

- Tu ne me déranges pas. Si ça se trouve, je suis celle qui trouble la paix de tes réflexions. Et ce n'est pas la peine de répondre à ça.

Toujours assise sur ses talons, Sans Fourrure s'approcha légèrement, humant l'air autour de l'Harmokien. Elle continua sur un ton morne, détaché.

- Le loup qui hurle à la lune ne le fais jamais seul par choix. Il hurle sa solitude, sa détresse, son besoin d'entendre une réponse à sa voix. Bien souvent, seul le vent s'y mêle. Le loup qui hurle sa douleur ne vit jamais bien longtemps. Le mal d'amour, de vivre, est sans pitié envers ceux qui l'abritent en leur sein.

Elle passa sa langue sur ses lèvres, ayant enfin reconnu l'odeur qui se dégageait la flasque.

- Tu comptes finir ça tout seul?

-Je commençais à me demander si tu cherchais la compagnie ou à boire gratuitement. Mon mal de vivre, comme tu l'appelles, est un choix, et également ce qui me pousse à aller de l'avant. Je ne m'attends pas à ce que tu comprennes toutefois. Toi et moi avons été élevé de manière bien trop différente pour que tu puisses comprendre.

*Élevé... C'est un grand mot. A-t-elle simplement reçu une véritable éducation?*

Agacé de devoir relever la tête de quelques centimètres pour regarder la jeune sauvage dans les yeux, il lui dit, un peu exaspéré sans toutefois être irrité.

-Assied-toi et incline la tête vers l'arrière.

*Pas question de lui donner la flasque. C'est un plan pour qu'elle se pousse avec.*

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Le sourire qu'elle avait au visage lorsqu'il commença à parler s'estompa. Les sourcils froncés lorsqu'il lui parla de son «choix», la prêtresse dévisagea le soldat un moment. Son expression demeura neutre un moment.

-Tu ignores tout de la façon dont j'ai été élevée.

Elle détourna les yeux, les fixant sur le ciel. Sa voix s'éleva dans un murmure, vacillante comme le vent, comme si ce n'était destiné qu'à elle-même et à la nuit.

- Je comprends ce que tu vis.

N'en disant pas plus. Elle s'approcha encore et fit comme il lui avait dit, sa langue passant rapidement sur ses lèvres à l'idée de peut-être recevoir de ce si délicieux liquide qui lui brûlait la gorge.

Peragus tint sa promesse, versant délicatement une demi-gorgée, peut-être plus, de whisky bas de gamme dans la bouche de Clélia. Il en prit ensuite une pour lui-même, observant sa compagne de boisson d'un air songeur. Il n'aimait toujours pas cette fille de la forêt, mais l'effet de son discours, et probablement également de l'alcool, parvint à la faire remonter tranquillement dans son estime, pas à pas.

-En effet, je n'ai aucune idée de ce que tu as pu vivre, répondit-il. Mais je doute que ça soit la diète d'entraînement rigoureux et de discipline rigide que j'ai vécu. J'ai de la difficulté à assimiler que tu puisses comprendre ce que je vis. Tu n'as pas le poids d'une unité sur tes épaules, tu ne t'es pas juré de les protéger, de leurs ennemis mais avant tout d'eux-mêmes, au péril de ta vie. C'est pas un reproche, mais force est d'admettre qu'on a pas la même vie toi et moi, et je doute que l'on puisse réellement comprendre quelque chose que l'on a jamais vécu.

Jamais personne ne lui avait demandé de prendre autant de poids sur ses épaules, et sa mission auto-imposée n'avait qu'un succès mitigé. C'était à se demander pourquoi il le faisait. Il y réfléchit un moment et la réponse lui vint naturellement. Il comprit à ce moment qu'il ne le faisait pas pour les autres : il le faisait pour son bonheur et seulement le sien.

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Clélia avala la gorgée avec plaisir, prenant le temps de bien savourer chaque goutte. Elle resta silencieuse pendant de nombreuses minutes après les paroles de Peragus.

- Tu as raison. Je n'ai pas eu la discipline que tu as eu. Pas de la même façon en tout cas. J'avais des frères, des soeurs pour jouer. Mais, un jour, quand on a été assez grands pour chasser, on a du subvenir aux besoin de toute la meute. Nous étions onze.

Je n'ai pas le poids d'une «unité» sur les épaules. Le devoir de prêtresse pourtant, en est un de guidance et de protection. La vérité, est que j'ai le poids de bien plus sur les épaules.

Elle prit le temps de réfléchir à ce qu'elle disait, ne voulant pas en révéler plus qu'elle ne le pouvait.

- J'ai le poids d'un peuple entier sur les épaules. On ne me l'a pas demandé, c'est ma pénitence. Une meute de perdu, par ma faute. Une vie entière à les défendre de ma vie. Voilà ce que je vie. Tu dis que je ne peux pas comprendre, tu parles comme si ceux qui comme moi, viennent de la forêt, ne savent rien de la vraie vie. Peut-être est-ce vrai.

Que penses-tu réellement de moi? Que je suis...sim...

Elle trébucha légèrement sur le mot.

- Simplette? Que je suis idiote parce que je n'ai pas été élevée comme une femme? Pourtant, je sais lire, écrire, réfléchir, me battre et prier. Je sais parler, et ce ne sont pas les loups qui m'ont appris.

Elle s'arrêta un moment.

- Que penses-tu, réellement, sincèrement de moi, petit d'homme?

Valkyrion l'écouta, intéressé, presque intrigué par ses propos. Contrairement à son interlocutrice, il ne se fit pas attendre avant de donner sa réponse.

-Je pense que tu avais peut-être raison. Peut-être que nous sommes plus similaires que je ne le croyais toi et moi. Mais je ne vois pas ce qu'une louve telle que toi pourrait avoir à faire de mon opinion.

Il détourna la tête et commença à divaguer sur sa vie, fixant un point dans le ciel, comme si Clélia n'existait plus.

-Je viens parfois à me demander si les dissensions que forment les Guildes sont vraiment justifiées. Nous sommes tous définis, assemblés et rassemblés à notre naissance selon notre ascendance alors que... Chaque individu est unique, et plusieurs naissent sous la tutelle d'un dieu et d'une série de dogmes qui ne leur ressemble pas du tout. Parfois je me demande : «Si on laissait le choix?»...

Mettant abruptement fin à sa réflexion, il enchaîna avec un sujet un peu plus d'actualité et beaucoup plus terre à terre.

-Qu'importe tout ça. On a bien plus sur les bras en ce moment, et bien plus encore à venir. Ma mission passe avant tout par la mise hors d'état de nuire du dieu fou, et je suis prêt à tout pour y arriver. Ça t'es en mesure de comprendre, c'est certain, et je ne doute même pas que tu dois avoir des objectifs similaires, quoique nos méthodes peuvent différer.

Je crois que tu tiens plus de l'alliée de circonstance que d'une véritable amie, mais saches que j'accepterai toute l'aide que tu pourra nous donner, que ce soit en nous accompagnant sur la première ligne ou en réfléchissant à des solutions pour mettre fin à ce chaos.

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La jeune femme écouta attentivement Peragus avec un sourire en coin. Elle ne s'était donc pas trompée à son sujet.

Lorsqu'il changea brusquement de sujet, elle ne s'en formalisa pas. Elle avait entendu ce qu'elle voulait.

-Oui, c'est mon but. Ou plutôt, un de mes buts. Je me sentirai mieux pour tout le monde lorsque cette créature et ceux qui l'accompagnent ne marcheront plus sur la terre. Peut-être que j'en mourrai. Peut-être que non.

Elle lorgna du coin de l’œil la flasque de l'Harmokien, sans tellement d'espoir, et replongea son regard dans celui du soldat.

- Je ne connais pas la distinction entre ami et allié. C'est la même chose pour moi. Je ne sais pas à quel mot va ma définition de la chose. Et ça ne m'intéresse pas de le savoir.

Elle pencha la tête légèrement sur le côté, comme en réflexion.

- Mais... je crois que tu y corresponds. Pour ce que ça vaut, mon aide, tu l'auras. Celle que je serai en mesure de t'apporter.

Peragus semblait étonné qu'elle lui accorde sa confiance plus rapidement qu'il ne lui accorde la sienne. Il savait et assumait pleinement qu'il n'était pas le genre d'homme à être très ouvert aux autres, mais il l'aurait imaginé plus...

*Indomptable?*

Ce mot qui lui vint en tête lui arracha un sourire. Ce n'est pas exactement le mot qu'il cherchait, mais il se plut à croire qu'il définissait la jeune femme se trouvant devant lui.

-Tant mieux alors. Il y a bien peu de missions que l'on peut vraiment mener seul, et celle-ci n'en fait pas partie.

J'ignore ce qui adviendra de nous, de nous tous, lorsque Miistromiir sera vaincu, mais je dois avouer ne pas être bien optimiste. Nous sommes toujours à l'aube d'une guerre de Guildes, et si elle venait à se répercuter jusqu'ici, qui sait si nous ne nous retrouverons pas toi et moi sur deux côtés opposés d'un champ de bataille.

La fin de sa phrase fut ponctué par un sourire marqué d'une anticipation que Valkyrion ne put entièrement camoufler.

Il détourna la tête et prit une gorgée d'alcool. Il se retourna pour la soupeser du regard avec envie. Il fut prit d'assaut par une curiosité folle, une pensée qu'il résorba avant qu'elle n'envahisse le reste de son esprit.

Il lui tendit la flasque, son visage ayant retrouvé sa froide neutralité.

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Les mots du soldat lui donna envie de sourire. Oui, il avait très certainement du potentiel, mais Clélia ne pouvait qu'espérer qu'il perdrait le restant de naïveté qu'elle devinait en lui. Un jour viendrait peut-être où elle pourrait lui faire confiance, elle l'espérait. Seul le temps pourrait le dire.

- Je n'ai que faire des guildes. Et de leurs guerres. Ça ne fait pas assez longtemps que je suis ici pour m'y sentir rattachée. Et je suis ici depuis assez longtemps pour avoir vu que guilde et priants, politique et religion, sont des choses bien différentes.

Quelque peu surprise qu'il lui tende sa flasque, elle la prit néanmoins. Elle la monta à la hauteur de son visage, et reprit.

- Je suis fidèle à mon dieu. Les querelles des guildes, qui n'ont rien à voir avec celles des dieux, ne m'intéressent pas. Si combat il y avait, je défendrais ceux qui en auront besoin, ceux qui dépendent de moi.

Et si, si nous devions nous faire face en combat...

Elle prit une gorgée de whisky, puis poussa un soupire. Le sourire aux lèvres, elle leva les yeux vers Peragus.

- Donne moi tout ce que tu as. Je ne me gênerai pas non plus. Mais ta mort, si le destin te réserve un tel sort, ne me donnera aucune satisfaction.

Elle lui rendit la flasque.

Quelque chose en Valkyrion lui disait qu'elle avait raison. Plus il passait de temps ici, plus il était à même de comprendre cette réalité, à savoir que dieux et guildes n'étaient pas si intimement liés comme il l'avait autrefois cru. Mais sa guilde, c'était sa famille. Sa famille, ses frères d'arme : la civilisation. Il ne pouvait se permettre d'y tourner le dos sans trahir Harmok.

La dernière phrase de Clélia produisit une sorte de déclic dans sa tête. Cela pouvait se voir dans son regard qui était désormais empreint d'une intensité sortant clairement de l'ordinaire.

*La mort de quiconque ne m'apporte jamais satisfaction, mais...*

Il se leva et dégaina sa lame d'un geste sec, regardant Clélia d'un air déterminé.

-Veux-tu jouer avec moi? demanda t-il, très sérieusement.

Il rangea sa flasque de sa main libre et la tendit vers Clélia. Un sourire arrogant, mauvais, presque sadique, ceignait son visage.

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Clélia avait senti autant que vu le changement chez le soldat. Un sourcil levé, pas tellement impressionnée, elle leva les yeux vers lui. Elle se leva, une main posée nonchalamment sur le manche Croc, et l'observa attentivement, ne montrant aucun signe d'agressivité, ni même d'inquiétude. De la simple curiosité, peut-être mêlée à un peu de déception face à son incapacité à avoir prédit la réaction de l'Harmokien.

- Tu savais que, même pour un humain, tu es plutôt imprévisible?

Une demie seconde plus tard, un sourire carnassier s'étirait sur ses lèvres. D'un geste, elle fit sauter Croc de son fourreau et, la tenant droite devant elle, elle fit mine d'apprécier les gravures que portaient la lame.

- Remarque, si ça n'était pas le cas, je n'aurais pas cette discussion avec toi.

Sans répondre à sa question, ni à sa main tendue, elle pencha la tête sur le côté, les yeux brillant d'une étrange lueur qui n'aurait rien dit de bon à quiconque n'étant pas l'homme qui lui faisait face, curieuse de savoir où il s'en allait avec ça.

Valkyrion sembla satisfait de la réaction de son interlocutrice. N'étant pas inquiet outre mesure, il retira sa main gauche près de son corps et avança sa lame devant lui, la pointe effleurant l'arme de Clélia. Même à cette distance, elle pouvait sentir que son haleine sentait l'alcool, mais l'Harmokéen avait tout de même l'air assez lucide dans ses propos.

-Je n'ai pas choisi cette carrière uniquement par devoir. J'aime le combat : c'est un art magnifique. Il y a tout un monde de différences entre combattre pour tuer et combattre pour la beauté de la chose, pour pousser nos limites à bout, et je crois que j'ai fini par l'oublier dans les derniers temps. Et puis tu m'arrives avec cette idée où toi et moi peut-être nous pourrions nous affronter. Et une voix dans ma tête me dit : «Pourquoi attendre?» Tu me donnes envie jeune fille, je ne l'ai jamais fait avec une louve.

Peragus avait l'air pour le moins excité à l'idée d'un affrontement. Il était assez improbable que Clélia l'aie déjà vu dans un tel état auparavant. Reprenant son souffle, il poursuivit.

-Je ne fait pas dans les demi-mesures. La chose perd de son charme lorsqu'il n'y a pas de sang. L'objectif n'est toutefois pas de s'entretuer, mais où est le plaisir lorsqu'il n'y a pas au moins un peu de stress, un peu d'adrénaline?

Alors vas-y, donne-moi ce que tu as. Voyons à l'œuvre cette soi disant férocité.

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Tout au long de la tirade de Peragus, Clélia n'avait pas sourciller. De «combattre pour la beauté de la chose», elle ignorait tout. Toutefois, son sourire un peu morbide ne la quittait pas, ni le feu qui habitait présentement son regard. Si vraie louve elle avait été, il aurait été facile de voir son excitation.

-Les loups se battent pour tuer. Ou pour vaincre. Parfois pour jouer. Mais je suis aussi un peu humaine.

Elle s'accroupie légèrement et mis sa lame devant elle, dans sa pose de combat habituelle et montra les dents, un léger rictus aux lèvres, un grognement sourd lui montant dans la gorge.

-Viens donc Petit d'Homme. Viens voir de quoi la louve est capable.

Le visage de Péragus devient de marbre alors qu'elle lui annonça qu'elle était prête. Une poignée de secondes passèrent sans qu'il ne bouge d'un millimètre.

Sans avertissement, Valkyrion attrapa son arme à deux mains et asséna un puissant coup de taille à son adversaire. La frappe était facile à esquiver, mais le coup n'avait manifestement pas été retenu.

Un coup qui avait la force de blesser, voire peut-être même de tuer.

Il enchaîna immédiatement avec deux autres coups, mettant à profit sa portée supérieure afin de garder son adversaire à l'écart.

Un sourire pervers illuminait à nouveau son visage. Le fil de pensés du caporal était un mystère pour la jeune louve. La seule chose qui était sûre, c'est qu'il éprouvait un plaisir certain à leur jeu.

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De son côté, la jeune louve continuait de sourire de toutes ses dents. L'attaque de Peragus ne l'avait pas surprise, ses instincts de chasseresse ayant pris le dessus. Si elle n'éprouvait pas autant de plaisir que le soldat, elle lui donnait tout de même tout ce qu'elle avait.

N'ayant pas la force de son adversaire, elle comptait surtout sur son agilité, sur sa capacité se mettre rapidement hors de porté et surtout, à attaquer de partout à la fois, sa stature et posture aidant.

Elle lui donnerait un combat dont il se souviendrait.